Pourquoi Saipol ne transforme pas 100 % de graines françaises dans ses usines ?
Guillaume De La Forest : La France produit environ 4,0 millions de tonnes de colza et dispose d’une capacité de trituration de plus de 4,0 millions de tonnes. Cependant, une part importante de la récolte française se situe dans le Nord-Est du pays et ce bassin de production est plus proche de certaines usines de trituration allemandes et belges que de nos usines Saipol du Mériot ou de Grand-Couronne. Chaque année, environ 1,0 million de tonnes de graines sont donc exportées vers les pays voisins. Et pour assurer la continuité des outils de trituration français, il est donc nécessaire d’importer ce million de tonnes pour compenser.
Pourquoi l’Allemagne ou la Belgique captent mieux les graines du Nord-Est de la France ?
Guillaume De La Forest,
Analyste de marché chez Saipol
Guillaume De La Forest : C’est une question de logistique et de prix ! Concrètement, cette zone Nord-Est est irriguée de nombreux canaux qui rejoignent le canal du Nord vers la Belgique ainsi que la Moselle, le Rhin ou la Meuse, qui sont des voies commerciales majeures. Il est plus facile et moins coûteux pour les organismes stockeurs de ces régions de charger une seule barge de 1000 tonnes que d’affréter 35 camions. A cette simplicité logistique s’ajoute que l’Allemagne produit environ 4,0 millions de tonnes de colza mais dispose d’une capacité de trituration de 9,0 millions de tonnes. Ce pays est donc structurellement déficitaire en graines et capte une bonne partie des graines des pays voisins en payant des primes très élevées, et le prix est un élément central de la stratégie des fournisseurs de graines.
Quelle place pour les graines françaises dans les approvisionnements des différentes usines Saipol ?
Guillaume De La Forest : Saipol privilégie toujours l’origine France et plus précisément l’approvisionnement local. Concrètement, l’usine Saipol du Mériot transforme 100 % de graines françaises et sa zone d’approvisionnement s’étend sur 350 km alentours pour assurer la continuité de l’usine. Cette zone d’approvisionnement se chevauche avec celle de Grand-Couronne qui achète 95 % du colza disponible dans sa zone de collecte de 150 km et doit ainsi compléter avec de l’import. Pour rappel, les usines de trituration françaises ont été construites ou agrandies à une époque où la France produisait en moyenne 5,2 millions de tonnes de colza entre 2009 et 2015. Depuis, la production est passée à 3,8 millions de tonnes en moyenne ces six dernières années. Les importations sont donc nécessaires pour assurer la continuité de nos outils industriels français appartenant aux agriculteurs français.